Les différentes gares Montparnasse

Pendant plusieurs mois, la gare Montparnasse a été en travaux. Comme Saint Lazare ou la gare de Lyon, en plus d’un nœud ferroviaire, elle devient un vaste centre commercial. Savez-vous que cette gare a eu bien des vies. Je vous propose de plonger dans les archives pour retracer en images cette histoire…

NB : Cet article comprend une anecdote cinématographique et une anecdote historique

Saviez-vous que la gare Montparnasse est l’unique gare parisienne ayant changé plusieurs fois de place.

Les débuts en 1840

Ça n’est pas moins de cinq gares qui se sont succédées depuis 1840.
Devant le succès de la ligne Paris – Saint-Germain-en-Laye, le gouvernement décide en 1836 de développer le réseau ferroviaire d’Ile-de-France en direction de Versailles, ce qui entraine la construction du modeste embarcadère de la barrière du Maine, mis en service le 10 septembre 1840, sur la commune de Vaugirard, qui ne sera annexée à Paris qu’en 1860.

Implantation de l’embarcadère de la barrière du Maine à l’extérieur du mur des Fermiers généraux, alors sur le territoire de l’ancienne commune de Vaugirard – aujourd’hui, angle sud-ouest de l’intersection du boulevard de Vaugirard et de l’avenue du Maine, ou actuelle place Raoul-Dautry. – (crédit : détail de la carte du chemin de fer de Paris à Versailles (rive gauche de la Seine)au 25 octobre 1838 – Éditeur :impr. de Lemercier, Bernard et Cie, Paris – http://gallica.bnf.fr)

A l’usage, l’embarcadère du Maine, situé hors des murs de Paris, est considéré comme trop excentré. La révolution de 1848 change le cours des choses. Le gouvernement provisoire, par décret du 27 février 1848, lance les travaux de construction d’une gare de chemin de fer de l’Ouest, sise entre le boulevard du Montparnasse et le mur des Fermiers généraux, et rapidement appelée gare du Mont-Parnasse.

Façade de la gare de l’Ouest du côté de la place de Rennes (actuelle place du 18 juin 1940), par Léon Leymonnerye (1803-1879). Paris (XIVème-XVème arr.), 1874. Crayon. Paris, musée Carnavalet.

L’extension de la voie ferrée depuis la barrière du Maine jusqu’au nouveau site nécessite la construction d’un viaduc, dit Viaduc du Maine, qui enjambe la chaussée éponyme.

Dessin au crayon, réalisé en 1876, de la gare de l’ouest (aujourd’hui gare Montparnasse) par Léon Leymonnerye (1803-1879). On notera sur le côté droit du dessin, le viaduc du Maine, 14e-15e arr. de Paris (source : musée Carnavalet).

Ces travaux nécessitent la démolition du bâtiment voyageurs de 1840 ; un autre bâtiment latéral provisoire est construit sur le côté nord-ouest. Cette nouvelle gare, mise en service en juillet 1852, endommagée par la Commune, comme l’atteste la photo prise en 1871, est une œuvre de style néo-classique.

Le bâtiment est fortement modifié au début des années 1860, suivant un décret du 23 décembre 1863, la halle et les pavillons latéraux sont agrandis. Sont aussi ajoutés des escaliers et rampes d’accès depuis la place de Rennes (aujourd’hui place du 18 Juin 1940) vers des cours supérieures agrandies (les grands escaliers intérieurs sont alors supprimés) ; la rue du Départ et la rue de l’Arrivée sont aussi élargies.

L’accident de 1895

Le 22 octobre 1895, une locomotive à vapeur d’un train Granville-Paris, dont le freinage à main était défectueux, traverse la façade de la gare. Cet accident qui laisse un trou béant dans la façade, a été photographié sous toutes les coutures et a défrayé la chronique  de l’époque.

Quelques jours après l’accident du 22 octobre 1895

L’accident ferroviaire du 22 octobre 1895 à la gare Montparnasse a été intégré à la trame narrative du film « Hugo Cabret » (2011) réalisé par Martin Scorsese.


En prévision de l’Exposition universelle de 1900, et par décret du 3 juin 1898, les cours supérieures et rampes d’accès sont inversées (accès depuis le boulevard Edgar-Quinet), et quatre voies à quai sont ajoutées selon les plans qui prévoient aussi un parking pour les automobiles et les bicyclettes sous la cour de départ, l’installation du chauffage dans certaines salles d’attente et l’éclairage électrique. Malheureusement les travaux commencés en 1898 ne sont pas prêts pour l’Exposition universelle de 1900.

Suite au rachat par l’État de la compagnie de l’Ouest en 1909, les extensions des gares Montparnasse et Vaugirard (marchandises) deviennent à l’ordre du jour.

L’entre-deux-guerres

La période de l’entre-deux-guerres témoigne d’une grande prospérité et la gare Montparnasse n’y échappe pas. Elle profitera elle aussi de l’essor du chemin de fer. La généralisation des vacances, conséquence des congés payés de 1936, multiplie par dix le trafic de la gare Montparnasse pendant les vacances. A nouveau, le trafic s’emballe et la gare devient trop petite pour l’absorber. Une nouvelle phase d’agrandissement est alors lancée. Elle se matérialisera par la construction de deux annexes en amont du viaduc : Maine Arrivée en 1929 et Maine Départ en 1938. Maine Départ est vouée à accueillir les trains Grandes Lignes, les trains de banlieue étant toujours exploités depuis la gare d’origine.

Le bâtiment de la demi-gare de Maine-Départ offrait un confort peu commode aux voyageurs devant prendre leur train depuis ces voies excentrées.


Une avant-gare d’arrivée provisoire avec six voies, desservies par trois quais pour les voyageurs, longs de 295 m, 330 m et 380 m, et de deux voies à quai pour les messageries, est néanmoins ouverte durant l’été 1926. Cette gare annexe reçoit, en 1929, un bâtiment voyageurs de style Art déco.

Dans les années 1930, à l’angle de l’avenue du Maine et du boulevard Vaugirard, la gare Montparnasse de style Art déco, œuvre de l’architecte Henri Pacon, sur la place Bienvenüe (encore dénommée place du Maine, jusqu’en 1933).
A la libération

A la libération de Paris, c’est à la gare Montparnasse, où il a installé son poste de commandement, que le général Leclerc reçoit le 25 août 1944, la reddition du général von Choltitz, gouverneur militaire de la garnison allemande de la capitale, le 84e corps d’armée.

Le Général De Gaulle avec le Général Leclerc et d’autres officiers français à la gare Montparnasse, le 25 août 1944. (crédit : Malindine E G (Capt), No 5 Army Film & Photographic Unit — Cette photographie BU 158 provient des collections de l’Imperial War Museums).
Il me semble reconnaitre Henri Rol-Tanguy au bord de la photo à droite

Dans les années 1960

La reconstruction de la gare est incluse dans une vaste opération de rénovation urbaine, du nom de Maine-Montparnasse, achevée au début des années 1970, et comprenant la nouvelle gare elle-même, un ensemble d’immeubles de bureaux et d’habitations de grande hauteur, la tour Montparnasse et ses bâtiments en base, ainsi qu’un gratte-ciel abritant un hôtel. L’opération Maine-Montparnasse est expliquée dans une vidéo promotionnelle de la SNCF datant de 1966.

Ce projet entraine la démolition de la gare construite en 1852, comme en atteste cette archive sonorisée disponible sur le site de l’INA et datant de mars 1966. Ce film permet également de voir l’animation des abords de la gare et notamment la place de Rennes (actuelle place du 18 juin 1940) et la rue de l’arrivée.

Je trouve assez émouvant de découvrir ce qu’il reste de l’architecture de l’ancienne gare Montparnasse en cours de démolition, d’autant que l’Office national de radiodiffusion télévision française (ORTF), non sans un brin d’humour ou d’ironie, fait un parallèle avec la construction moderne de la nouvelle gare dans ce film musical produit en 1967.

La façade de la nouvelle gare suite à l’opération Maine-Montparnasse de réorganisation urbanistique du quartier Montparnasse, réalisée dans les années 1960-1970 (Crédit : SARDO Médiathèque SNCF).

Le parvis de la gare Montparnasse, en avril 1969, avant la construction du tunnel de l’avenue du Maine (crédit : Roger-Viollet – source : Paris en images)


Ce projet urbain est tellement énorme qu'il donnera certainement lieu à un article spécifique sur ce blog, d'autant que de nombreuses archives sont disponibles en ligne pour l'illustrer. (Crédit : Patrick Olivain - SNCF). 

La façade de la gare Montparnasse sur l’actuelle place Raoul-Dautry évolue encore et se dote d’une grande verrière.

Une façade de verre, avancée par rapport au fronton initial, est ajoutée. Elle est parfois recouverte de campagnes publicitaires. Celle-ci a l’avantage d’offrir le stade de France en illusion d’optique. (Crédit : Les Montparnos, juin 2007)
Les années 2000…

La SNCF porte un nouveau projet de modernisation de la gare dont les travaux ont démarré en 2017 et se sont achevés en 2021. Il s’inscrit dans un programme plus vaste de remaniement du quartier Montparnasse voulu par la Mairie de Paris. Mais ça c’est une autre histoire…

Les travaux de la gare Montparnasse ont débuté du côté de l’avenue du Maine et du quartier de la Gaité. (Crédit : Les Montparnos, juin 2018)


Liens complémentaires :
Pour celles et ceux qui voudraient approfondir l’histoire de la gare Montparnasse, consultez la page Wikipédia qui est pas mal détaillée ainsi que Paris 1900 | L’art nouveau, TransportRail, Paris projet ou vandalisme, Wikiwand et la page de Roland Arzul (2016) avec de nombreuses illustrations.

6 réflexions sur « Les différentes gares Montparnasse »

  1. Petite précision: la commune de Vaugirard est annexée en 1860: c’est cette année-là que Paris devient la ville qu’on connaît, avec ses vingt arrondissements

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *